Tshisekedi et Kamerhe : Toujours union sacrée ou divorce programmé ?

La démission de Vital Kamerhe de la présidence de l’Assemblée nationale, le 22 septembre 2025, a provoqué un séisme au sein de l’Union sacrée de la nation, plateforme politique qui soutient  le Président Félix Tshisekedi.

Redaction

24 Septembre 2025 - 09:39
24 Septembre 2025 - 10:47
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Tshisekedi et Kamerhe : Toujours union sacrée ou divorce programmé ?
Félix-Antoine Tshisekedi & Vital Kamerhe

Confronté à une série de pétitions, l’ancien directeur de cabinet du chef de l’État et vice-Premier ministre honoraire de l'économie, a préféré jeter l’éponge plutôt que de subir un vote humiliant.

Rapidement, des soupçons ont circulé sur l’implication de Tshisekedi dans cette manœuvre. Mais depuis New-York, où il participe à l’Assemblée générale des Nations unies, le Président Félix Tshisekedi a tenu à clarifier sa position.

« Je n’y suis pour rien. Je le considère toujours comme un frère, comme un allié », a-t-il déclaré.

Cette sortie médiatique confirme que, malgré les secousses institutionnelles, la porte reste ouverte au maintien de l’alliance scellée en 2018 entre les deux personnalités.


Des signaux contradictoires avant la démission

La veille du départ de Kamerhe, une rencontre a eu lieu entre Billy Kambale, secrétaire général de l’Union pour la Nation Congolaise (UNC), et Augustin Kabuya, son homologue de l’UDPS. Ces échanges ont porté sur la gestion des pétitions visant le bureau de l’Assemblée nationale. Élément à épingler : Crispin MBindule, initiateur de la pétition, est membre de l’UDPS, pourtant alliée de l’UNC au sein de l’Union sacrée. Un signe que les tensions internes dépassaient de simples querelles personnelles et s’inscrivaient dans une bataille politique plus large.


Le poids de l’histoire : Kamerhe, habitué des ruptures

La démission de 2025 rappelle un précédent. En mars 2009, alors président de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe quitte ses fonctions pour des raisons politiques majeures. Désaccord avec la gestion du pouvoir, volonté de préserver son image politique, pressions internes au PPRD, son ancien parti politique, et sa position sur l’entrée des troupes rwandaises en RDC en janvier 2009 (dans le cadre d’une opération conjointe contre les FDLR), qui fortement déplu au Président Kabila et à son entourage. Il avait dénoncé l'absence de consultation du Parlement sur cette décision, rupture scellée avec Joseph Kabila, voie balisée pour une longue marche au désert.

Seize ans plus tard, l’homme politique se retrouve de nouveau contraint de quitter le perchoir, ce qui confirme une trajectoire jalonnée de ruptures et de réconciliations.


L’accord de 2018 entre UDPS-UNC : une alliance fondatrice

En 2018, Kamerhe avait renoncé à sa candidature présidentielle pour soutenir Félix Tshisekedi. Ensemble, ils avaient construit le ticket gagnant de l’opposition Cap pour le Changement (Cach) face au candidat du FCC, Emmanuel Ramazani Shadary.

En contrepartie, Kamerhe obtenait le poste stratégique de directeur de cabinet du chef de l’État, au lieu de la Primature, comme convenu. Pour certains, c’est lui qui avait donné une véritable ossature politique à la victoire de Tshisekedi.

Mais l’idylle s’est rapidement brisée : en 2020, Kamerhe a été arrêté, jugé et condamné dans l’affaire du programme des 100 jours. Une épreuve vécue comme une humiliation par son camp. Après son acquittement, il a été réhabilité et s’est vu confier directement la vice primature à l'Économie nationale et en 2023 la présidence de l’Assemblée nationale.


Tshisekedi et Kamerhe : alliance sous tension

Aujourd’hui, la relation entre les deux hommes apparaît à la fois fragile et nécessaire.

 « Vital Kamerhe est libre de ses choix, mais pour moi, il reste un partenaire », a insisté Tshisekedi à New-York. 

Un message d’apaisement, mais aussi une manière de renvoyer la balle à son allié : si rupture il y a, elle viendra de lui. Kamerhe, de son côté, a profité de son discours de démission pour réaffirmer sa loyauté : « Je reste loyal au président de la République », a-t-il lancé devant la plénière.

Une relation faite de calculs et de dépendances

Trois variables détermineront l’avenir de cette alliance politique :
1. le rapport de forces au Parlement, où l’UNC peut encore jouer les arbitres ;

2. la capacité de Tshisekedi à contenir les ambitions concurrentes au sein de l’Union sacrée de la nation ;

3. la décision de Kamerhe de se repositionner pour 2028 ou de rester dans l’ombre.

Une union fragile mais toujours vivante

L’histoire politique congolaise l’a montré : entre alliances, ruptures et réconciliations, rien n’est jamais figé. L’union entre Tshisekedi et Kamerhe n’est pas encore rompue, mais elle traverse une zone de turbulences.

Tant que Tshisekedi l’appelle « frère » et que Kamerhe se dit « loyal », le pacte de 2018 tient encore debout. Mais la vraie question n’est plus de savoir si cette alliance survivra, mais jusqu’à quand.

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