Kinshasa sous les eaux : une pluie de deux heures plonge la capitale dans le chaos [reportage]
Il était un peu plus de 16 heures lorsque les premières gouttes ont commencé à tomber sur Kinshasa. En moins d’une heure, la pluie s’est transformée en déluge, inondant rues, avenues et quartiers entiers. La capitale congolaise a basculé dans un chaos urbain, révélant une fois de plus ses vulnérabilités structurelles.
Des embouteillages monstres ont paralysé la circulation. À la Place Victoire, où convergent des milliers de Kinois en fin de journée, les eaux ont envahi la chaussée, charriant ordures, plastiques et boue. « On marche dans une poubelle géante. L’eau et les déchets montaient jusqu’aux genoux », témoigne Pascal, vendeur ambulant, impuissant face à la montée des eaux.
La rivière Kalamu a débordé, déversant son trop-plein sur les grandes artères comme Sendwe, Bokasa et Kasa-vubu rendant la circulation quasi impossible. Les prix du transport ont triplé : de 1 000 à 3 000 FC pour certains trajets, poussant les passagers à marcher pendant des kilomètres.
« Tout le monde patauge, personne n’avance, et les taxis en profitent », déplore Mireille, fonctionnaire coincée à Victoire. « On est abandonnés. »
Dans ce désordre, les bandits urbains surnommés « Kuluna » ont profité de la confusion pour dérober sacs et téléphones, notamment dans les zones peu éclairées. « Ils surgissaient de nulle part, profitaient des files d’attente et des mouvements désorganisés pour arracher », rapporte un motocycliste témoin d’une scène à proximité du marché Gambela.
Le photographe Nathanaël Milambo, présent sur plusieurs sites, a capté des images frappantes : voitures immergées, avenues inondées, passants hébétés sous la pluie, la capitale transformée en scène de désolation.
Les Kinois lancent un cri du cœur : « Il ne suffit pas de condamner les inondations chaque saison. Il faut entretenir les caniveaux, nettoyer les marchés, planifier la ville. Ce n’est pas normal qu’en 2025, une pluie de deux heures paralyse Kinshasa. »
En fin de soirée, les eaux commençaient à se retirer, laissant derrière elles des routes jonchées de déchets, des boutiques inaccessibles, et une ville une fois de plus surprise par ce qu’elle devrait anticiper.