Tungstène « rwandais » aux USA : quand les richesses de la RDC profitent à Kigali
Le Rwanda a annoncé avec enthousiasme l’arrivée de sa première cargaison de tungstène sur le marché américain, exportée par la société Trinity Metals. Une « fierté nationale », selon Kigali, qui voit dans cette opération une étape stratégique dans le renforcement de ses relations économiques avec les États-Unis.

Mais à Kinshasa, cette annonce soulève de nombreuses interrogations : d’où vient réellement ce tungstène ? Plusieurs experts rappellent que le Rwanda ne dispose pas de gisements industriels significatifs de ce minerai, laissant entendre que cette cargaison pourrait provenir de l’Est de la RDC, une région riche en minerais mais en proie à l’instabilité et à la prédation armée.
Pour les autorités américaines, ce partenariat avec Kigali vise à diversifier les chaînes d’approvisionnement et à sécuriser l’accès à des minéraux stratégiques. Pourtant, cette logique commerciale ignore les tensions géopolitiques profondes dans la région des Grands Lacs. Kinshasa accuse depuis longtemps le Rwanda d'exploiter illégalement ses ressources à travers des groupes armés actifs dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri.
Pendant ce temps, l’Assemblée nationale congolaise n’a toujours pas statué sur un éventuel accord minier entre la RDC et le Rwanda, alimentant un flou juridique autour de l’origine de ces exportations.
Dans un contexte de conflit latent entre Kinshasa et Kigali, cette « victoire économique » du Rwanda met en lumière le risque de balkanisation économique : les minerais de la RDC continuent de quitter le pays, sans que la population congolaise n’en tire de bénéfices tangibles.