[Tribune] : « Nécessité de changement de méthode de gouvernance », (Dede Watchiba)

Comme intellectuel congolais, je suis effaré de voir de videos dans lesquels une partie du peuple congolais exprime son ras le bol en réclamant le retour aux affaires de ses anciens dirigeants en raison de l’incapacité de ses dirigeants actuels d’améliorer la situation générale du pays ; ce peuple, frappé d’amnésie, a carrément oublié que ses anciens dirigeants sont largement responsables de sa misère actuelle (comme illustration, voir documents Congo hold-up). Sans l’ombre du moindre doute, tous les régimes passés en RDC ont laissé derrière eux un paysage de désolation dans le pays.

Sous ma casquette de professeur de science politique, tout en adoptant une posture de neutralité, je dois dire que les éléments factuels du système politique congolais confirment sans ambiguïté la désillusion générale due au fait que les dirigeants actuels donnent l’impression de naviguer à vue et d’être insensibles aux inputs de l’environnement général, bref de manquer de méthode rationnelle de gouvernance.

Les fondements de la bonne gouvernance sont en train d’être mis en mal et de s’effondrer progressivement : multiplication d’effets d’annonce en faveur de la population sans actions concrètes, manque de cohérence dans l’action publique (lutte contre la corruption en même temps libération des personnes condamnées de corruption), déficit d’efficacité dû au manque d’un système de suivi et évaluation fonctionnel nécessaire pour garantir et rectifier la mise en œuvre de l’action publique, mauvais casting de hauts responsables publics (inadéquation profil personnel et profil du poste), etc.

En science politique, « L’Etat en action », pour améliorer le quotidien de la population, exige la maitrise au moins des rudiments du modèle séquentiel de politiques publiques. Il faut s’entourer de gens qui maitrisent le basic de ces notions ou il faut un séminaire de mise à niveau. Ces vertébrés pourraient changer de méthode de gouvernance et faire la différence.

D’ici fin 2023, il est techniquement et politiquement possible de donner des signaux clairs qui peuvent profondément changer la situation générale du pays et transformer totalement l’opinion publique. Il faut juste s’entourer des gens capables, compétents, crédibles et honnêtes. Ainsi, le président Tshisekedi pourrait se targuer d’un bilan flatteur et obtenir un nouveau mandat sans forcing. Sinon, la fracture sociale et démocratique risque d’être un de grands échecs du quinquennat actuel.

Lorsqu’une société perd ses repères, c’est la déchéance à coup sûr.

Professeur d’Universités, Chercheur et Analyste Politique, Dede Watchiba.